Sur l'artiste
Ellen Jess a étudié dans trois académies différentes, dans trois pays : Karlsruhe en Allemagne, Washington aux États-Unis et den Bosch ici aux Pays-Bas, pays où elle a également vécu. C'est une artiste singulière, qui va au fond d'un thème et d'une technique avec beaucoup de succès. Ces dernières années, son thème était la fleur d'iris. Le matériau consiste en des couches de papier japonais peint. Ellen est une femme très érudite qui s'y connaît, une travailleuse acharnée. Elle possède un immense atelier, un hall d'usine, qui est entièrement rempli de ses œuvres d'art, certaines prêtes et beaucoup en cours, vertigineuses. Quant à la technique : des couches de papier japonais peint. Par deux fois déjà, j'ai accueilli dans la galerie un artiste qui travaillait avec du papier japonais. La première fois, c'était Nikki van Es dans ma première " POP-UP Gallery " à l'université de Wageningen en 2012, avec du papier suspendu librement dans l'espace, peint avec des motifs végétaux inexistants, de l'ADN pour couper les arbres. En 2013, la Suisse Annette Haeberling avec des plaques de papier peintes déchirées et collées ensemble, des œuvres inspirées par la nature. Et maintenant Ellen Jess. Mais c'est très différent. J'ai vu Ellen occupée et elle modèle presque avec le papier, fait des formes tridimensionnelles comme dans ces armoires en plexiglas. Ou plusieurs couches rapprochées. Le papier coloré est plié et disposé en un tout dans un style qui lui est propre. Qu'en est-il du thème ? J'ai récemment donné deux conférences au Musée d'Arnhem sur la " valorisation de l'art " et la " collection d'art ". L'une des thèses était "l'art donne un aperçu". Un regard sur l'histoire, la vie autour de nous, notre société, nous-mêmes. C'est la raison pour laquelle les gens placent des œuvres d'art chez eux : pour avoir un aperçu en se laissant influencer par la vision qu'un artiste a eue et qu'il veut transmettre. Quel aperçu l'art d'Ellen Jess nous donne-t-il ? Pour le savoir, j'ai comparé son art avec celui de son mari, Theo Kuijpers, qui a eu une magnifique exposition au Musée de Pont à Tilburg l'année dernière. Avec ses tons de terre, il nous met les deux pieds sur terre, dans la nature australienne ou avec des tons pastel dans une ville méditerranéenne : il nous enracine dans notre environnement. Pas Ellen. Son travail est beaucoup plus éthéré, plus léger. Où nous emmène-t-elle ? C'est la fleur de l'iris. L'utilisation de beaucoup de bleu rend l'œuvre légère et aérienne. La signification plus profonde, du moins pour la biologiste que je suis, est la reproduction, la reproduction, sous toutes sortes de formes, y compris humaines. Non pas qu'elle représente ce processus ou cet acte, mais l'atmosphère, l'importance. Regardez l'œuvre : " Iris heart ". Et elle danse, regardez l'œuvre : " la lumière dessine l'Iris ". On pourrait aussi appeler cette exposition : La danse de la procréation. Cela s'accorde d'ailleurs très bien avec les sculptures de Jan Pater, dont certaines proviennent de l'exposition précédente, toutes en torsion. Après le communiqué de presse sur l'exposition de Jan, j'ai été invité à une interview à la radio d'Arnhem. La première question était : "L'artiste s'inspire du torse humain. Il s'agit donc bien de seins et de fesses" ? Ce n'est pas le cas. Dans l'art de Jan Pater, le torse est plus qu'une "Persona sexuelle" (Camille Paglia) ; il s'agit de la personne entière, y compris ses sentiments et sa psyché. Il en va de même avec le travail d'Ellen, qui représente pour moi la reproduction d'organismes. Elle ne dépeint pas cet acte, ni ces organes, mais l'essence. Son art porte sur la danse de la vie.